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Employée harcelée après un hold-up


30 Novembre 2016

CFF La régie publique lui propose 6600 fr. d'indemnité. Employée depuis 23 ans, elle refuse.

B. travaille depuis 23 ans aux CFF.

En 2011, B. a été victime d'un brigandage en pleine nuit en gare de Nyon. Unique femme employée au groupe d'intervention des CFF à Genève et Nyon, cette Genevoise a eu la peur de sa vie. Jamais elle n'aurait imaginé que ses ennuis ne faisaient que commencer...

«Pas un travail de femme»

A la suite de ce hold-up, elle dit avoir manqué de soutien de la hiérarchie et avoir même essuyé des moqueries, des remarques désobligeantes et sexistes de certains collègues et d’un supérieur. Elle cite des exemples: «Tu n’es pas faite pour ce métier, c’est pas un travail de femme, tu conduis comme une fille.» On lui aurait dit aussi qu’en tant que femme, elle n’aurait jamais dû être engagée parce qu’elle est petite et déstabilisable.

Des propos qu’elle a dénoncés à l’interne dès 2012 sans pour autant avoir été prise au sérieux, selon elle. Les choses ne vont pas en s’arrangeant. Un collègue lui aurait promis des représailles si elle ne changeait pas de comportement. Très affectée, B. manque des dizaines de jours de travail. A son retour, elle raconte avoir été écartée de son poste et ballottée de stage en stage en dépit de son expérience et des compétences acquises durant plus 23 ans aux CFF. Une enquête administrative, confiée à une société externe, est diligentée. «Le rapport d’enquête reconnaît expressément le harcèlement sexiste, relèvent Mes Daniel Meyer et Butrint Ajredini. Dans un premier temps, les CFF n’ont pas voulu admettre les conclusions du rapport. Ceux-ci ont même exprimé leur intention de licencier B. alors qu’elle est l’unique victime».

B est alors une énième fois déplacée dans un autre service soit au bureau de change. Le climat de travail est pesant, dit-elle.

En 2015, les entretiens et le bras de fer avec les ressources humaines se multiplient. «Les CFF ont tenté de médicaliser le dossier, déplorent les avocats. Soit de faire passer notre cliente pour une personne malade et donc inapte à l’exercice de sa fonction et de toute autre fonction au sein des CFF, ce qui est faux comme l’attestent son médecin traitant, mais aussi le médecin-conseil des CFF!»

Mais B. persiste et signe: elle demande 24 000 fr. d’indemnité pour tort moral et un reclassement conforme à ses compétences: «Je n’allais quand même pas continuer à remplir le bancomat de billets du bureau de change!» En juin dernier, devant l’ensemble de ses collègues et de certains clients, un supérieur lui intime l’ordre de ne plus venir travailler le lundi suivant: «Tu ramasses tes petites affaires et tu pars tout de suite, et pas la peine de revenir le lundi, je ne veux plus te voir», aurait-il dit. Qu’à cela ne tienne elle y retourne et se retrouvera peu après dans le hall de Cornavin avec ses affaires contenues dans deux sacs Migros. «On veut porter atteinte à ma réputation comme si j’étais une vulgaire criminelle alors que je subis du mobbing et du harcèlement psychologique qu’on refuse de reconnaître comme tel.»

En juin, la lettre et le projet de décision des CFF n’évoquent que des remarques sexistes et la virulence d’un supérieur à une occasion. «Nous entendons constater qu’il est vraisemblable que vous avez été victime de harcèlement sexuel.» Les CFF, qui excluent en revanche le mobbing (impliquant une notion de continuité dans les actes) lui offrent un mois de salaire à titre d’indemnité: «Il apparaît vraisemblable que vous avez été confrontées à des remarques ou plaisanteries sexistes l’indemnité, un mois de salaire, soit 6597 fr., vous sera versée avec le salaire d’août.»

Son poste passe à l’as

Mais B., qui effectue un nouveau «stage», selon ses termes, au siège des CFF à Berne, refuse de se contenter de ce montant et surtout de cette décision. Elle craint maintenant que les CFF ne la licencient pour motif «économique» puisque la régie fédérale a annoncé cet automne un plan d’austérité comprenant la suppression de 1400 postes. Effectivement son poste passe à l’as l’an prochain. La direction lui a donc conseillé de postuler ailleurs qu’à Genève et Nyon en raison des incidents passés. «Notre cliente vient d’apprendre qu’elle fera partie de la charrette. On lui a reproché dans la foulée de ne pas avoir postulé à temps pour les autres postes en Suisse romande. Ce n’est pas normal. Nous contesterons une fois de plus sa mise à l’écart».

Frédéric Revaz, le porte-parole de la régie publique précise que «les CFF ne tolèrent en aucun cas le mobbing, ni le harcèlement sexuel. Ils ne font par ailleurs pas de commentaires lorsque des procédures sont en cours.»

Source: TDG
Image: Steeve Iuncker-Gomez